Ce 14 juin 2017, le Conseil d’État de Cuba lançait le processus électoral pour élire les délégués des assemblées municipales et provinciales, puis les 612 députés de l’Assemblée Nationale.
On ne dirait pas comme ça, mais c’est le coup d’envoi d’un bouleversement profond pour l’île : l’élection d’un nouveau Président à l’horizon 2018. Et pour la première fois depuis plus de 50 ans, il ou elle ne portera sans doute pas le même nom que les précédents. Explications :
Tout commence dans les assemblées de quartier : Les citoyens se réunissent pour proposer plusieurs candidats qui deviendront au terme de l’élection « delegados de circunscripción del Poder Popular ». Il faut en désigner 2 au minimum et 8 au maximum. Retenez bien ce détail, car pour les élections suivantes (Asamblea Provincial, etc.), il n’y aura plus qu’un seul candidat.
Qui présente des candidats ? La puissante Central de Trabajadores de Cuba, les CDR, la FMC (Federación de Mujeres Cubanas), la Federación Estudiantil Universitaria et, en millieu rural, l’Asociación Nacional de Agricultores Pequeños, réunis en commissions électorales. Notez que les membres de ces assemblées ne sont pas élus mais désignés par le pouvoir en place…
La société civile aussi peut présenter des candidats, mais dans les faits il est très rare que les assemblées de quartier choisissent un.e candidat.e qui ne soit pas homologué.e par l’une des instances nommées ci-dessus. Sauf en 2015 où deux circos de La Havane ont fait de la résistance, voyez l’article Voto ! pour en savoir plus.
Ces candidats, vous ne les verrez pas tracter sur les marchés : ce sont les commissions électorales qui rédigent leurs biographies et les affichent dans le quartier sur de modestes feuilles A4. Tout comme en France, les élections se déroulent dans les écoles mais avec un peu plus de décorum, puisque les enfants en tenue de pioneritos montent la garde auprès des urnes. Une fois élus, les délégués formeront l’Asemblea Municipal del Poder Popular et leur pouvoir sera tout aussi limité que leur budget comm.
Mais plus intéressant : ces assemblées municipales désigneront à leur tour les candidats aux élections des 15 assemblées provinciales et la moitié des candidats à l’Assemblée nationale, l’autre moitié étant investie par les organisations de masse citées plus haut, Central de Trabajadores de Cuba en tête.
Nous approchons de la fin de ce long processus pyramidal, où comme chez nous, mais pas pour les mêmes raisons, l’homme et la femme du peuple n’ont qu’une petite chance d’arriver à se faufiler jusqu’au sommet : Le nouveau parlement se réunira – selon un calendrier qui n’a pas encore été fixé – pour élire parmi ses membres le Conseil d’État, qui à son tour désignera un.e Président.e.
Alors, plus que jamais, tous les yeux seront fixés sur cette île des Caraïbes qui tient dans le monde – et dans notre imaginaire – « une place sans proportion avec son poids économique et démographique »¹.
¹ Citation extraite d’un article de Jean Mendelson, ancien Ambassadeur de France à Cuba, Huffington Post 29/11/2016.