S comme sombras

« Sin el Negro Cuba no seria Cuba. »
Fernando Ortiz

Vous êtes de type caucasien ? La discrimination raciale ne vous sautera pas aux yeux à Cuba. Mais elle est bien là et se manifeste de la même façon que dans les rues de nos villes européennes…

Pourtant un des chantiers de la Revolución a été de combattre le racisme et dès 1961 celui-ci était officiellement éradiqué. Belle performance pour ce pays qui a été la plaque tournante du commerce des personnes réduites en esclavage…

La Habana, ministerio del azucar 2010. Photo Céline Gruyer.

1 000 Sombras de piel

Aujourd’hui on admet généralement que 37 % des Cubains sont des Blancs (majoritairement d’origine espagnole), 51 % sont des Métis (reste à savoir qui se considère comme métis) et 11 % sont des Noirs d’origine africaine. Les Asiatiques représentent 1 % de la population et les Amérindiens, occupants originels de l’île, ont presque disparu. Voir à ce sujet l’article D’où venaient les premiers Cubains ?

Notez que les Africains d’Angola, du Nigeria ou du Sénégal ne sont pas l’unique apport de population depuis que les conquistadores ont décimé les Taïnos : des Chinois, Japonais, Français (via Haïti surtout), Libanais, Jamaïcains, États-Uniens et Canadiens ont émigré de tous temps. Et plus récemment des Russes !

Munis de ces quelques chiffres vous pouvez vous balader dans Centro Habana, dans le reparto Van Van à Santiago, ou vers Santa Ana à Trinidad et vous constaterez un parallèle entre nuance de peau et grande pauvreté. À l’inverse, visez l’Asamblea Nacional del Poder Popular : les Noirs – et les femmes – y sont bien entendu sous représentés.

Trinidad, barrio Santa Ana 2015
Trinidad, barrio Santa Ana 2015
Baracoa, escuela 2012

Mais le sujet du racisme est complètement tabou dans la vie courante. Souvent, pour vous parler d’une personne à la peau noire on ne prononcera pas le mot negro, mais on fera un signe de l’index droit sur l’avant-bras gauche, pour attirer votre attention sur sa couleur de peau (anecdote garantie véridique).

En revanche le sujet est abondamment documenté dans la littérature depuis le XIXe siècle, la parole étant presque toujours aux Blancs. Un exemple parmi d’autres, le roman Cecilia Valdes de Cirilio Villaverde, suivi du film Cecilia de Humberto Solas, 1982 : des Blancs contant les malheurs d’une femme métisse.

Afro-cubain-es

Ça bouge avec les rappers qui parlent ouvertement de racisme, avec une nouvelle génération d’artistes qui revendiquent, entre autres, leur pratique de la santería et avec des mouvements qui luttent pied à pied pour la reconnaissance des droits citoyens des afro-cubains.

Portrait de groupe à la Fabrica de Arte Cubano.

Ci-dessous quelques liens vers des cours en ligne de l’Université Toulouse II-Le Mirail qui traitent du sujet :

Peaux noires regards blancs Sylvie Mégevand

De Cuba à Miami, la trajectoire d’un Noir cubain Aline Rouhaud

Expressions de la « négritude américaine » dans la poésie de Nicolás Guillén et de Langston Hughes Anne Vigne Pacheco

Voyez aussi l’article Cuba : l’activisme afro-cubain en 7 projets.


Photo à la Une : Toutes les couleurs de peau, San Isidro, Habana Vieja, été 2018

Suite de l’abécédaire de l’espace public ici :

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