Retour définitif et durable de l’Être Aimé, j’ai nommé Gabriel García Márquez, Gabo pour 3 générations de Cubains. Il aurait eu 90 ans cette année et c’est sous la forme d’une statue de bronze qu’il apparaît désormais dans un discret jardin de Habana Vieja. Une pile de livres sous le bras et une rose dans la main droite, il semble se promener tranquillement ou émerger d’un rêve lointain.
On dit que lors de sa première visite en ce jardin, alors en ruines, Gabo y rencontra « Rosa la Yerbera », une semi sorcière qui connaissait le secret des plantes. Descendante d’Indiens, Africains et Espagnols, elle lui aurait conté les mystères et sortilèges dont étaient capables les herbes et les fleurs. Un personnage à la García Márquez, en somme.
La maison comme tout bordel à l’aube, était ce qui ressemblait le plus au paradis. Je suis sorti par le portail du jardin pour ne croiser personne. Sous le soleil torride de la rue, j’ai commencé à sentir le poids de mes quatre-vingt-dix ans et à compter minute par minute les minutes des nuits qui me restaient avant de mourir. Gabriel García Márquez, Mémoire de mes putains tristes, traduit de l’Espagnol par Annie Morvan, Grasset 2005.
Il y eut beaucoup d’autres visites, car l’écrivain était un ami personnel du chef de l’État et parce qu’il contribua à former une génération de journalistes, puis à créer l’Escuela Internacional de Cine y Televisión, EICTV pour les pros, une des meilleurs écoles de cinéma et télévision du monde.
Cette dernière, située à San Antonio de los Baños, en grande banlieue de La Havane, ne se visite pas. Mais pour voir la statue de Gabo vous n’aurez pas à aller si loin : le jardin qui l’abrite est celui du Palacio del Marqués de Arcos, situé Plaza de la Catedral. Le bâtiment, bien restauré, possède deux façades (dont l’une donnant sur la calle Mercaderes) et les plus beaux mediopuntos de la vieille ville.
Mais revenons à la statue, inaugurée le 16 février dernier : la figure du prix Nobel de Littérature est l’œuvre du sculpteur José Villa Soberón, qui a déjà donné à l’Île quelques portraits plus vrais que nature : Ernest Hemingway accoudé à son bar favori (je n’y ai jamais mis les pieds), John Lennon songeur dans un parc du Vedado (oui j’y ai fait un selfie, comme tout le monde) et Benny Moré paradant sur le Bulevar de Cienfuegos, entre autres…
Ah dernier détail : c’est Gabriel García Márquez qui a mis le journal de Wendy Guerra (alors adolescente) entre les mains de Carmen Balcells, fameuse agente littéraire catalane. On connaît la suite (sinon, il faut de précipiter sur les romans de Guerra, édités en français chez Stock) et rien que pour cela, il les mérite, ses roses !
Voir l’article de Milagros López de Guereño Gabriel García Márquez se queda en La Habana, Cuba sur le site de El Tiempo.
Voir l’article Jacqueline Meppiel le montage comme art de combat sur le site Slate.
Photo à la Une : jour d’inauguration. Droits réservés.