Carteles : une touche de nostalgie

L’esprit et la sophistication de la société cubaine des années 30, 40, 50 ? Vous allez les retrouver intacts dans les créations réalisées par Andrés García Benítez pour la revue Carteles.

Mais pourquoi dans serendipia, vous direz-vous, alors que les sites proposant des témoignages d’avant 1959 sont très nombreux et généralement bien documentés ? Disons que je suis bluffée par la qualité du graphisme et la représentation d’une Havane multiculturelle et élégante – là où la plupart des albums photo des années 50 ne montrent que la société blanche et bourgeoise.

Andres Garcia Benitez, deux couvertures pour la revue Carteles.
Andres Garcia Benitez, deux couvertures pour la revue Carteles.

De plus, ces images devraient être une formidable inspiration pour les stylistes qui surfent sur la mode Ananas/Cuba/chapeau-de-paille. Tremble, Karl ! Vous pouvez consulter un beau portfolio dans l’article de Cuban Art News.

Pour l’heure ces petites merveilles sont à contempler à Holguin  si vous passez par l’Oriente cubain (où l’on panse les plaies du cyclone Matthew…) mais on les verrait bien rassemblées dans un livre à feuilleter tout en sirotant un Ron Collins…

Andres Garcia Benitez, couverture pour la revue Carteles.
Andres Garcia Benitez, couverture pour la revue Carteles.

Voici comment tout cela a commencé : En 1932 Alfredo T. Quílez, propriétaire de l’hebdomadaire Carteles, commanda une couverture à un très jeune peintre encore inconnu. On ignore encore comment il l’avait déniché dans la lointaine cité de Holguin. D’autant qu’à l’époque Andrés García Benítez n’avait que 16 ans et aucune formation académique.

Cette commande marqua le début d’une longue et prolifique carrière  : `les couvertures de Carteles furent la meilleure lettre d’introduction du jeune provincial dans le monde de l’art des années 30 et “Andrés, el de Carteles” devint rapidement la coqueluche de La Havane.

Ses couvertures de magazine représentent aujourd’hui un extraordinaire monument à la Cubania de l’époque, avec leur maîtrise formelle et leur grâce unique. Mais ce n’est pas tout : À partir de 1942 il devint aussi créateur de décors et costumes. Sa passion du spectacle datait du temps où son père Don Saturnino Garcia Zaballa, amateur de théâtre, d’opéra et de zarzuela, l’emmenait écumer les salles.

Doña Rosita La Soltera et La Zapatera Prodigiosa, de Federico García Lorca, Electra Garrigó de Virgilio Piñera et Romeo y Julieta de Shakespeare sont sans doute les plus mémorables de ses créations, même s’il collabora aussi avec Ramiro Guerra pour la danse et avec Alicia Alonso pour le ballet. Et… à Cuba, comment ne pas s’intéresser au cabaret ? Le Tropicana, le Parisien et le Capri s’en souviennent encore.

Dans les années 60 Andrés García Benítez partit à Porto Rico, pour ne revenir sur son île natale qu’un an avant sa mort en 1981.

Aujourd’hui le Centro Provincial de Arte de Holguin célèbre le centenaire de sa naissance avec cette petite mais jolie expo issue de collections publiques et privées.

À visiter si vous êtes dans l’Oriente cubain, pour un peu de légèreté par ces temps dramatiques.

Andres Garcia Benitez, couverture pour la revue Carteles.
Andres Garcia Benitez, couverture pour la revue Carteles.

Sources : Possessed Cuban Illustrator Still Seduces the Public dans Cuban Art News et Andres, el de Carteles, cumple cien años de Martín Garrido Gómez dans Opus Habana.

Image à la Une : Andrés García Benítez, couverture pour le magazine Carteles, 1956. Courtesy pinterest.com.


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