K comme calle K

Calle K

C’est la limite de l’exercice : comme il faut une entrée pour cette lettre, j’ai été faire un tour dans la calle K. Ça tombe bien car cette rue du Vedado qui démarre au pied de l’Université et débouche sur le Malecon est un précipité du quartier. Sa physionomie se modifie en permanence, notamment depuis le développement du cuentapropismo.

La Havane, calle K, Teatro El Sotano, siège de la compania Rita Montaner

Le début de K est coincé entre les rues 27 et 25. Là se tient un petit théâtre : El Sótano. Bizarrement aménagé au sous-sol d’un immeuble, El Sótano programme des pièces contemporaines toute l’année et participe régulièrement au Festival de Théâtre de La Havane. Un lieu modeste mais fréquenté par la faune théâtrale, j’y ai même croisé quelques stars. Une adresse à connaître !

Ensuite il faut contourner le chantier du futur PLUS HAUT HÔTEL DE LA HAVANE, dont l’ascension verticale est fortement freinée par la crise économique. Lors de note dernier passage début 2020, le chantier ressemblait toujours à une mine à ciel ouvert…

Puis on débouche sur la calle 23, autrement nommée la Rampa. On est au carrefour le moins exotique de la capitale : cinéma, magasin de disques, hôtel international et un début d’embouteillages. Perro caliente pas plus mauvais qu’ailleurs mais beaucoup moins cher.

Heureusement qu’il y a Coppelia et sa file d’attente pour nous rappeler qu’on est à Cuba ! Après avoir choisi sa glace, on contourne le parc, prêt à amorcer la descente vers l’océan qu’on devine déjà. Ici les maisons auraient besoin de grosses réparations, mais en attendant les habitants agrandissent leur logement en transformant le jardin en séjour, avec portail bricolé et Yemaya de stuc qui veille sur tous.

Logement d’un couple de retraités malades, calle K, La Havane 2016

Enfin… presque tous, car au coin de 19 se trouvait un pauvre garage qui servait d’abri à un couple de retraités… Obligés de vivre quasiment sur le trottoir, dans un dénuement absolu, dans ce quartier pourtant réputé plus prospère que d’autres. Ils ont fini par perdre la bataille et une pauvre cafeteria – une de plus – occupe désormais les lieux.

En face, le marché de 17 y K continue d’attirer tout le quartier à la recherche de fruits et légumes abordables. Sur le toit terrasse, les boxes de cuentapropistas diversifient leur offre : de la médecine naturelle à la pièce détachée de cocotte-minute, on y trouve tout. Quant à la cafétéria Sueños d’Mayajígua qui a pris la place d’un dépôt de fruits et légumes, elle a déjà changé de propriétaires plusieurs fois.

Plus bas, à l’ombre des flamboyants  dont les racines soulèvent le trottoir, de nombreux petits commerces se sont installés : un fleuriste dans la cour, un chapelet de cafétérias aux noms très créatifs (Karachi !) parfois aménagées dans d’anciennes entrées de garage… Mais le coin n’étant pas touristique, ces commerces en monnaie nationale ne doivent pas rapporter grand chose.

La Havane, entre les calles K et L, un parque équipé du wifi et de bancs à dossiers.

Au croisement de la calle Línea vous attend une surprise, et une bonne ! Le petit Parque triangulaire, dans lequel les retraités viennent faire leur taï-chi le matin, s’est trouvé un nouvel usage : en France on l’appellerait Espace de co-working, à La Havane c’est tout simplement une des nouvelles zones wifi. Moins fréquentée que celle de la Rampa, on y trouve facilement une place assise. Ne soyez pas surpris : la police vous y veille comme partout, peut-être seulement de façon un peu plus visible.

À l’approche du Malecon l’architecture se fait plus balnéaire, quelques immeubles sont bien retapés et au niveau du bien nommé Parque de los Suspiros, une quantité impressionnante d’affichettes fleurissent pour proposer des services administratifs : démarches, formulaires, traductions… Pas étonnant : on est entre l’ambassade et le bureau des visas pour les Etats-Unis (fermé depuis 2018, fin du rêve).

Enfin on arrive au bord de l’océan, en plein vent. Avec un peu de chance on va se faire rincer par d’énormes vagues avant de trouver un taxi pour remonter vers l’agitation de la ville… par la calle J.

La Havane, Malecon y K 2014
La Havane, Malecon y K 2014

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Photo à la Une : zone réservée aux détenteurs de libreta, sur le marché 17 y K.


Suite de l’abécédaire de l’espace public ici :

4 réflexions sur « K comme calle K »

  1. Joli travail… j’espère que d’autres vont tomber dessus et l’apprécier.
    Ah, la calle K… je l’ai connue dans les dernières années d’un siècle qui aujourd’ui encore ne résigne toujours pas à mourir.

    Il s’y passe bien des choses, calleK… la Funeraria, entre Calzada y 9, est le lieu où viennent se réunir les familles des habaneros connus ou inconnus avant un dernier voyage vers le cimetière (c’est cette funeraria qui apparait dans le film Guantanamera).

    Cette partie de la rue est sous le niveau de la mer, elle se retrouve parfois sous deux mètres d’eau, comme en 2005 avec le passage de l’ouragan Wilma. Viennent ensuite les derrumbes et le départ vers d’autres quartiers (forcément moins bien) pour les habitants dont la maison s’est écroulée.

    Comme une mâchoire qui ne verrait plus de dentiste, le bas de la rue gagne de nouveaux trous ces temps-ci…

    Plus haut, il y a le mercado de 17 y K, un des marchés les moins chers du secteur, le cours de la tomate ou de la banane plantain y est 2 à 4 fois inférieur à celui pratiqué dans le joli marché de 19 y B, surnommé « la boutique », en français dans le texte.

    Il y a de nombreux commerces plus ou moins clandestins, l’ex video club a déjà connu deux révolutions technologiques en 20 ans, d’abord le passage de la VHS au « dividi », et maintenant on peut y aller avec sa clef USB pour « cargar la memoria » et la remplir de ces délicieux poisons que sont les novelas brésiliennes, mexicaines, colombiennes ou latinas « made in Miami »…

    Loterie clandestine, « mani » (celle qui se fume) ou Chispatren (alcool de contrebande franchement toxique)… dans cette rue, comme dans tant d’autres, 50 ans de Revolucion n’ont pas empêché toutes sortes de commerces de se maintenir.

    Chaque rue de la Havane est comme ces gros gâteaux d’anniversaire, une jolie meringue colorée qui brille à la surface, et dessous, parfois une belle surprise où des éléments plus inavouables…

  2. Merci beaucoup pour toutes ces infos il faudra que j’y regarde de plus près la prochaine fois !
    La Funeraria je l’ai loupée mais je connais bien le marché 17 y K, j’y achète toujours des fleurs pour mes logeuses, Alicia y Maria (casa particular sur Linea, entre M y N, ¡ muy buena dirección !). J’y ai vu des vieilles dames faire les poubelles le 31 décembre… Mais je ne suis qu’une touriste qui ne reste pas longtemps à chaque fois, alors si vous avez d’autres témoignages pour compléter les articles n’hésitez pas !
    Céline

  3. L’université de la Havane a été fondée en… 1728 ! L’une des premières d’Amérique ! Il faut faire un tour dans le quartier de l’université (derrière les escaliers), depuis la rue San Miguel puis Ronda… splendeur passée, on imagine les étudiants du 18e sur ce campus magnifique ! Aujourd’hui, tout est comme le reste, à l’abandon. Au coin des deux rues, il y a le Musée de… Napoléon ! Il paraît qu’il est très chouette, je n’y suis pas encore allée.

  4. Une autre bonne idée de visite !
    Mais il faut que je complète cette page car j’ai oublié de parler du Teatro El Sotano qui s’y trouve. To be continued…

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